Sans dévoiler de secrets commerciaux, as-tu un exemple de l’une de ces minuscules choses qui s’est améliorée ou qui a changé au fil des ans, de la première génération à 2021 ?
AJ : De manière globale, l’allure du véhicule, cette prise d’air sur le capot et la conception de la cage de protection. Quand j’ai commencé, les véhicules étaient très hauts. Ils ont été abaissés aujourd’hui et leur apparence est plus stylée. Et ça pourrait donner un peu plus de vitesse. Donc, ce sont des choses comme ça.
Fascinant. Avec ce que tu sais maintenant des courses à l’étranger, quels enseignements as-tu ramenés en Amérique du Nord ? As-tu changé d’approche ?
AJ : Oui, bien sûr. En Amérique du Nord, ce ne sont pas des courses sur plusieurs jours. Ça dure un jour et c’est donc très différent. Tu vois, il n’est pas possible de se dire « Ok, nous les battrons demain » ou « C’était une très mauvaise journée aujourd’hui, ça ira mieux demain » et des choses comme ça. C’est vraiment juste « Allez, allez, allez ! ».
Donc certainement, de ce point de vue-là, plus tu roules vite, plus le risque de casse est important, c’est évident. Il s’agit juste d’apporter un petit peu de cette mentalité de rallye sur le Baja 1000, par exemple, et de le diviser mentalement en étapes de disons 400 kilomètres. Donc, tu coches les étapes les unes après les autres, de ce point-ci à ce point-là. Découper mentalement la course et créer des étapes est vraiment quelque chose que le rallye m’a enseigné et ça m’aide beaucoup.
Que tu aies bien ou mal fait, au moins mentalement, tu peux en quelque sorte le mettre à la poubelle et passer à l’étape suivante.
AJ: Oui. Tout à fait. Du genre « Nous avons peut-être perdu une minute là-bas ou nous avons gagné une minute ici. » Et donc on peut attaquer la course suivante avec une stratégie et on peut l’adapter à la volée : « On a été rapide sur cette étape, donc on devrait peut-être ralentir sur les 400 prochains kilomètres. » Et nous verrons ensuite où nous en sommes.
Ou, on a crevé et perdu cinq minutes ici. Donc, sur la prochaine étape de 400 kilomètres, on y va et on fonce. Donc oui, ça m’a vraiment aidé d’apprendre à faire ça et de cloisonner la course mentalement. Et tout ça grâce au rallye.
As-tu des amis ou de la famille qui ne font pas partie du monde du hors-route ou du Dakar et se demandent même ce que tu fais ? Comment expliques-tu ce que tu fais dans la vie ?
AJ : À part mon père et ma mère, les amis avec qui je suis allé à l’école notamment ne savent pas vraiment comment ça marche. Je vais leur montrer la carte et ils diront : « Tu fais tout ça ? Tu parcoures tout le pays ? »
et je leur réponds que oui. Et ils me demandent : « Tu cours jour après jour après jour ? »
C’est définitivement un concept qui est étranger à beaucoup de personnes en Amérique, c’est donc assez difficile à expliquer, mais oui, c’est clair une fois que je leur montre la carte et que j’explique un peu. J’aime comparer ça au Tour de France. Beaucoup de personnes le comprennent comme ça.
Qu’est-ce qui aiderait à faire mieux comprendre ce sport ?
AJ : Je pense qu’une très bonne façon de le décrire est de dire que c’est beaucoup plus mental que ce qu’on pense. C’est beaucoup plus que le simple fait de piloter une voiture. Évidemment, la position de votre voiture et votre agressivité et des choses comme ça et la conduite sont énormes. Je veux dire, c’est évidemment le but.
Pourtant, l’aspect mental, être capable d’être constant, être capable de rester calme quand tout ne se passe pas parfaitement.
Être capable de faire face à des situations à la volée, se dire que les freins perdent de leur puissance ou que la direction ne réagit pas tout à fait correctement, puis d’être en mesure de s’adapter et de faire face. Il s’agit de faire beaucoup plus que conduire très vite. Il faut être capable de prévoir les manœuvres du véhicule.
Cela demande beaucoup plus de réflexion que de simplement conduire très, très vite dans le désert. C’est complexe.